jeudi 25 décembre 2008

la 8ème femme de Barbe Blanche

Basil (c'était Marie) conte de Noël année 2005
conte n° 3

la 8ème femme de Barbe Blanche

Elle a toujours aimé les esquimaux. Récemment encore elle s’en était délectée dans une salle obscure, s’en pourléchant les babines à s’en humecter les yeux. Le film qu’elle était allée voir n’était pas récent, mais pour arriver au Pôle Nord, il en avait fait du chemin. Elle n’a pas hésité quand elle a vu le programme de cette semaine là : “Le Père Noël est une ordure”. Imaginez qu’elle y a couru, d’autant qu’elle connaissait bien le sujet !
Elle était déjà en froid avec lui , c’était même glacial, à la limite de transes sibériennes.

Lui, toujours par monts et par vaux, la délaissait. Elle disait de lui qu’il était vieux,bedonnant, inconditionnellement affublé de son habit rouge, sans jamais s’en parfumer. Lui ne l’honorait plus, lassé de l’entendre évoquer ses migraines.Il avait pris le parti de l’ignorer et se complaisait dans un médiocre quotidien sentimental. Pourtant elle n’était sa septième épouse que depuis deux ans, relativement guillerette , d’aucuns diront même sexy et n’avait que 70 ans !

Ah ! un esquimau, elle aimerait en goûter un pour de vrai. Elle n’hésita pas lorsque Seppo, un Same de 50 ans lui fit des avances sur le site de rencontres “pole-position”. Un premier rendez-vous, un coup de foudre réciproque, une première fugue avec ce lapon, pongiste de renom, sportif bien conservé. Ses escapades, de plus en plus nombreuses débouchèrent rapidement sur une rupture.

“l’Echo des Icebergs” dans un entrefilet discret (pour ménager les éventuelles retombées économiques), reprit une partie du jugement de divorce : “Il résulte de l’enquête et de la contre-enquête que l’épouse assignée a fait preuve d’une vie dissolue, et prononce le divorce à ses torts exclusifs”. La réputation du Père Noël était sauve.

Il en riait bien Papa Noël, enfin libre ! à lui la belle vie, la chasse allait pouvoir recommencer. Il utilisa, pour l’avoir vue faire, le même procédé que son ex.
C’était en juillet, un mois creux avant la course haletante et les affres des délais à tenir. Utilisant un moteur de recherches il tomba sur une liste immensément fournie de sites de rencontres. Le choix était difficile, mais il se décida pour “le cercle Paul erre” qui semblait adapté à son flottement actuel. Il était d’autant plus approprié qu’il proposait un nombre fabuleux d’annonces venant d’Afrique Noire. Oui ! Papa Noël lui aussi avait un fantasme, une Mère Noël différente de toutes celles qu’il avait connues jusqu’alors.


Là-bas, au Gabon, en pays orungu, sur la lagune, tout près de Port-Gentil, Miroska, une jeunette de 50 ans n’en pouvait plus d’attendre. Elle avait pourtant bien vu, elle pouvait même le dire, que son destin allait changer bientôt. Même que son ex, Monsieur Mir avec qui elle avait gardé des relations confortables, le lui avait confirmé.

Est-ce d’avoir lu Michelet qui lui donnait cette belle vision d’avenir ou ses dons divinatoires ?

“.... Des brumes violettes, mais assez transparentes pour voir les étoiles à travers.Un grand arc lumineux apparaît, les deux pieds posés sur le sombre horizon.....voilà que dans l'arc majestueux d'un jaune pâle, dans sa paisible ascension, éclate comme une effervescence ...” etc...

Elle savait maintenant, que la voie s’ouvrait inéluctablement . Son aïeule, ridée, édentée, mais toujours aussi affectueuse le lui avait prédit également.
“Mir n’est pas l’homme de ta vie, et même si cela doit me rendre malheureuse, je te vois partir, loin, très loin. Ce n’est pas un avion que tu prendras, non, non ! un objet volant que je n’identifie pas pour l’instant ! Ah ma gazelle, promets-moi de t’en aller couverte de partout, lui je le perçois costaud et surtout très généreux, âgé certes mais tout doux, floconneux de partout”

Et comme chez Walt Disney tout commença par une souris.

Des contacts épistolaires fréquents,des contributions ping-pong sur les forums de “Cercle Paul erre”(le pongiste de l’ex Madame Noël pouvait aller se rhabiller !), par mail, des échanges de photos, de numéros de mobile et une première rencontre. Père Noël avait profité d’un répit professionnel en septembre (la première quinzaine est toujours plus calme, allez savoir pourquoi, la rentrée peut-être ?) . Et ce fut l’apothéose, la fête de l’amour, le faîte du plaisir, le summum exalté d’une passion qui ne finira jamais de rendre Cupidon bienheureux.

Après un retour douloureux et deux mois d’intenses échanges, vint la veille de Noël. Consciencieux malgré son coeur débordant d’amour, Papa Noël entreprit son périple mondial.Avant de rentrer il s’arrêta à Port-Gentil, la gazelle prit place à ses côtés, et les rennes la saluèrent par une ola peu commune.

Miroska l’avait vu, Miroska pouvait enfin le dire : son plus beau Noël, son plus beau cadeau .... un homme amoureux, généreux et les aurores boréales.

“L’écho des Icebergs” en a bien sûr fait sa “Une” , tout comme “le Miroir des Savanes”, “les Potins du Tonkin”, “Le reflet du Tibet” , et ils n’étaient pas les seuls, le monde entier(presque, il y a toujours des trouble-fête, pffff !) a salué cette belle histoire d’amour, plus belle encore qu’un conte de Noël.


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